Lorsque vous envisagez de vous engager dans un projet d’intérêt général, la question du cadre juridique se pose immédiatement. Entre une association régie par la loi de 1901 et une fondation encadrée par la législation de 1987, les différences structurelles et opérationnelles sont considérables. Ces deux formes d’organisations à but non lucratif poursuivent des missions sociales, culturelles ou humanitaires, mais leurs mécanismes de création, de financement et de gouvernance divergent profondément.
En bref :
- L’association repose sur un regroupement de personnes autour d’un projet commun, sans apport financier obligatoire à la création
- La fondation s’appuie sur un patrimoine affecté de manière irrévocable à une mission d’intérêt général, nécessitant un apport initial conséquent
- La gouvernance associative fonctionne selon un principe démocratique avec des votes en assemblée générale
- Les fondations sont dirigées par un conseil d’administration non élu par l’ensemble des contributeurs
- Le cadre comptable et les obligations administratives varient considérablement entre ces deux structures
- Des organisations comme France générosités, la Fondation de France ou APF France handicap illustrent ces différences dans leurs modes opératoires
Les fondements juridiques : association loi 1901 versus fondation loi 1987
La distinction entre association et fondation commence par leur cadre légal respectif. L’association trouve son origine dans la loi du 1er juillet 1901, qui définit ce groupement comme la convention par laquelle deux personnes ou plus mettent en commun leurs connaissances ou leur activité dans un but autre que le partage des bénéfices. Cette définition souligne le caractère collectif et participatif de l’association, où la dimension humaine prime sur les considérations patrimoniales.
À l’inverse, la fondation est encadrée par la loi du 23 juillet 1987 sur le développement du mécénat. Cette législation structure un dispositif permettant à une ou plusieurs personnes physiques ou morales d’affecter de manière irrévocable des biens, droits ou ressources à la réalisation d’une œuvre d’intérêt général. Le patrimoine devient ainsi l’élément central, transcendant la notion de collectif pour se concentrer sur la pérennité d’une mission.
Cette distinction fondamentale se reflète dans les modalités de création. Pour constituer une association, il suffit de rassembler au minimum deux personnes partageant un projet commun et de rédiger des statuts. Aucun capital minimal n’est requis, et la déclaration en préfecture suffit pour obtenir la personnalité morale. Des structures comme Emmaüs France ou les Restos du Cœur ont commencé ainsi, avec une logique d’action collective immédiate.
| Critère | Association loi 1901 | Fondation loi 1987 |
|---|---|---|
| Base juridique | Convention entre personnes | Affectation patrimoniale irrévocable |
| Nombre de fondateurs minimum | 2 personnes | 1 personne physique ou morale |
| Apport financier initial | Non requis | Obligatoire et substantiel |
| Procédure de création | Déclaration en préfecture | Autorisation administrative ou reconnaissance d’utilité publique |
| Modification des statuts | Flexible, décision en AG | Encadrée et contrôlée |
La souplesse de création associative explique pourquoi on recense plus d’un million d’associations actives en France, contre quelques milliers de fondations. Cette différence quantitative témoigne d’une accessibilité radicalement différente. Lorsque vous souhaitez lancer une initiative locale sans disposer de fonds conséquents, l’association s’impose naturellement comme le véhicule juridique privilégié.
Le régime de la fondation implique des contraintes administratives plus lourdes dès la création. Pour une fondation reconnue d’utilité publique, il faut non seulement constituer un dossier complet démontrant la viabilité du projet, mais également obtenir l’accord du Conseil d’État après instruction par le ministère de l’Intérieur. Cette procédure peut s’étendre sur plusieurs années, contrairement à la création associative qui peut être finalisée en quelques semaines. Pour comprendre les enjeux financiers de telles structures, une bonne gestion financière optimisée s’avère indispensable.
La nature du projet influe également sur le choix de la structure. Si votre ambition consiste à mobiliser un réseau de bénévoles pour des actions de terrain, l’association offre la flexibilité nécessaire. En revanche, si vous disposez d’un patrimoine conséquent que vous souhaitez affecter durablement à une cause, la fondation garantit une pérennité institutionnelle supérieure. Des organisations comme UNICEF France ou WWF France opèrent d’ailleurs souvent avec des structures hybrides combinant association et fondation.

Les spécificités de la fondation d’entreprise
La fondation d’entreprise constitue une catégorie particulière créée par la loi de 1990. Elle permet à une société commerciale ou civile de constituer une structure dédiée à des actions d’intérêt général, tout en conservant un lien organique fort avec l’entreprise fondatrice. Contrairement à la fondation reconnue d’utilité publique, elle ne peut recevoir de dons ni faire appel public à la générosité, se finançant exclusivement par les versements pluriannuels de son ou ses fondateurs.
Ce modèle présente l’avantage d’une procédure de création simplifiée, par simple déclaration en préfecture après autorisation administrative. La durée de vie minimale est fixée à cinq ans, avec un programme d’action et un budget pluriannuel prédéfinis. Cette formule séduit les entreprises souhaitant structurer leur politique de mécénat dans un cadre juridique sécurisé, tout en bénéficiant d’avantages fiscaux substantiels.
Les fondations d’entreprise doivent néanmoins respecter une indépendance de gestion vis-à-vis de l’activité commerciale de leur fondateur. Le conseil d’administration doit compter au moins un tiers de personnalités qualifiées extérieures à l’entreprise, garantissant ainsi une certaine autonomie dans les décisions d’attribution. Cette exigence distingue clairement le mécénat d’entreprise structuré des simples actions de sponsoring commercial.
Gouvernance et processus décisionnels : démocratie contre administration
La gouvernance constitue un point de divergence majeur entre association et fondation. Dans une association, le principe démocratique structure l’ensemble du fonctionnement. Les membres se réunissent en assemblée générale, instance souveraine qui élit le conseil d’administration, approuve les comptes, valide les orientations stratégiques et modifie les statuts si nécessaire. Chaque adhérent dispose théoriquement d’une voix égale, incarnant la dimension participative de la structure.
Cette logique démocratique favorise l’engagement des membres et leur appropriation du projet associatif. Les organisations comme le Secours Catholique fonctionnent ainsi avec des instances territoriales où les bénévoles participent activement aux décisions. Ce modèle horizontal encourage l’innovation sociale et l’adaptation rapide aux besoins du terrain, mais peut parfois ralentir les processus décisionnels lorsque les effectifs sont importants.
La fondation adopte une approche radicalement différente. Le conseil d’administration, composé de personnalités nommées selon des critères définis dans les statuts, exerce l’autorité décisionnelle. Les donateurs initiaux ne conservent pas nécessairement de droit de vote proportionnel à leur contribution, et le fonctionnement s’apparente davantage à celui d’une entreprise qu’à celui d’un collectif. Cette structure garantit une stabilité institutionnelle et une continuité stratégique sur le long terme.
| Aspect | Association | Fondation |
|---|---|---|
| Instance suprême | Assemblée générale des membres | Conseil d’administration |
| Mode de désignation | Élection démocratique | Nomination selon statuts |
| Pouvoir des fondateurs | Égal aux autres membres | Variable selon statuts, peut être limité |
| Modification des orientations | Vote en assemblée générale | Décision du conseil d’administration |
| Contrôle externe | Limité (préfecture pour associations RUP) | Renforcé (autorité administrative, Cour des comptes) |
Les obligations de transparence diffèrent également. Une association classique publie ses comptes uniquement si elle reçoit des subventions publiques dépassant un certain seuil. Une fondation reconnue d’utilité publique subit un contrôle permanent de l’autorité administrative, avec obligation de publication des comptes annuels et rapport d’activité détaillé. Cette surveillance vise à protéger les intérêts des donateurs et à garantir l’affectation des ressources aux missions statutaires.
La question de la représentativité mérite attention. Dans une association, la légitimité provient de la base militante ou adhérente. Le président et les administrateurs tirent leur autorité du vote de leurs pairs, créant une dynamique ascendante. Dans une fondation, l’autorité découle de la mission statutaire et du patrimoine affecté, dans une logique descendante où les administrateurs agissent en gardiens d’une volonté initiale. La structure Médecins Sans Frontières illustre ce modèle avec une gouvernance professionnalisée centrée sur l’efficacité opérationnelle.
Cette distinction dans les modes de gouvernance influence directement la capacité d’adaptation. Une association peut pivoter rapidement ses activités en fonction des besoins émergents, dès lors que l’assemblée générale l’approuve. Une fondation reste davantage ancrée dans sa mission initiale, garantissant la fidélité à la volonté des fondateurs mais limitant parfois la réactivité face aux évolutions sociétales. Le choix entre ces deux modèles dépend donc de votre vision : privilégiez-vous l’agilité collective ou la pérennité institutionnelle ?
Le rôle du conseil d’administration dans chaque structure
Le conseil d’administration d’une association se compose d’élus issus des rangs des adhérents, renouvelés régulièrement selon les modalités statutaires. Ces administrateurs agissent bénévolement dans la majorité des cas, incarnant l’engagement citoyen au service du projet collectif. Leur mandat reste révocable par l’assemblée générale, maintenant ainsi un lien permanent entre la gouvernance et la base associative.
Dans une fondation, les administrateurs sont choisis pour leurs compétences spécifiques ou leur notoriété dans le domaine d’intervention. Ils peuvent être rémunérés dans certaines conditions, reflétant la professionnalisation de la gouvernance. Leur nomination obéit à des critères de compétence technique, juridique ou sectorielle, créant un conseil d’expertise plutôt qu’un organe de représentation. Cette composition favorise une gestion patrimoniale rigoureuse et une stratégie d’allocation des ressources optimisée.
La durée des mandats diffère également. Les associations renouvellent fréquemment leurs instances dirigeantes, tous les deux ou trois ans généralement, favorisant la circulation des responsabilités et l’émergence de nouvelles énergies. Les fondations privilégient des mandats plus longs, parfois de six ans renouvelables, assurant une continuité stratégique et une mémoire institutionnelle. Si vous souhaitez approfondir les aspects juridiques de ces structures, notamment concernant le choix du meilleur statut juridique, plusieurs critères similaires s’appliquent.
Financement et ressources : adhésions contre dotations patrimoniales
Les modèles économiques de l’association et de la fondation divergent fondamentalement. L’association finance ses activités par une combinaison de cotisations des membres, de subventions publiques, de dons ponctuels et éventuellement de ressources propres issues d’activités lucratives accessoires. Cette diversité des sources de financement confère une flexibilité appréciable mais impose une recherche constante de ressources, année après année.
Les cotisations représentent souvent la première source de revenus des associations de petite et moyenne taille. Elles matérialisent l’adhésion au projet et créent un sentiment d’appartenance. Toutefois, leur montant reste généralement modeste, ne permettant pas de financer des projets d’envergure sans recourir à des compléments. Les subventions publiques constituent alors un levier essentiel, particulièrement pour les associations intervenant dans des domaines reconnus d’intérêt général comme l’action sociale, l’éducation populaire ou la culture.
La fondation s’appuie quant à elle sur un capital de dotation constitué lors de sa création et affecté de manière irrévocable à sa mission. Ce patrimoine génère des revenus financiers qui financent les actions menées. La fondation reconnue d’utilité publique peut également recevoir des dons et legs, souvent en franchise de droits de mutation, renforçant ainsi ses capacités d’intervention. Cette stabilité financière permet de planifier des actions sur le long terme sans dépendre des aléas de financements annuels.
- Les associations peuvent organiser des événements de financement participatif pour financer leurs projets spécifiques
- Les fondations bénéficient d’avantages fiscaux renforcés pour attirer les grands donateurs et mécènes
- Les associations d’utilité publique peuvent recevoir des legs au même titre que les fondations RUP
- Les fondations abritées profitent de la notoriété et de l’infrastructure de leur fondation abritante
- Les associations peuvent développer des activités économiques complémentaires dans certaines limites
Le régime fiscal différencie également ces structures. Les associations bénéficient d’exonérations fiscales pour leurs activités non lucratives, mais restent imposables sur leurs activités économiques concurrentielles. Les fondations, de par leur reconnaissance d’utilité publique, jouissent d’un régime fiscal privilégié étendu. Les donateurs bénéficient de réductions d’impôt plus avantageuses lorsqu’ils contribuent à une fondation RUP plutôt qu’à une association classique, ce qui facilite la collecte de fonds importants.
| Source de financement | Association | Fondation |
|---|---|---|
| Cotisations membres | Source principale pour beaucoup | Non applicable |
| Subventions publiques | Fréquentes et variées | Possibles mais moins fréquentes |
| Dons ponctuels | Autorisés, déduction fiscale 66% | Autorisés, déduction fiscale renforcée |
| Legs et donations | Uniquement si RUP | Oui pour fondations RUP |
| Revenus du patrimoine | Marginaux généralement | Source structurelle majeure |
| Appel public à la générosité | Autorisé avec déclaration | Autorisé sauf fondation d’entreprise |
La Croix-Rouge française illustre parfaitement cette dualité financière. Structurée en association reconnue d’utilité publique, elle collecte des dons auprès du grand public, reçoit des subventions pour ses missions de service public, et développe des activités économiques comme la formation aux premiers secours. Son modèle économique mixte lui permet d’intervenir massivement tout en préservant son indépendance financière vis-à-vis des pouvoirs publics.
La question de la pérennité financière se pose différemment selon la structure. Une association dépend de sa capacité à renouveler chaque année ses sources de financement, créant une certaine précarité structurelle. Une fondation dispose d’un socle patrimonial stable, mais doit gérer rigoureusement ses actifs pour maintenir leur valeur réelle dans la durée. Cette gestion patrimoniale requiert des compétences financières pointues, justifiant la professionnalisation croissante des équipes dirigeantes.
Les contraintes comptables et de reporting
La comptabilité associative bénéficie traditionnellement d’un régime simplifié, adapté au caractère souvent bénévole de la gestion. Une petite association peut se contenter d’une comptabilité de trésorerie, enregistrant simplement les encaissements et décaissements. Seules les associations dépassant certains seuils de ressources ou d’activité doivent tenir une comptabilité d’engagement conforme au plan comptable associatif et faire certifier leurs comptes par un commissaire aux comptes.
Les fondations supportent des obligations comptables plus lourdes dès leur création. La tenue d’une comptabilité d’engagement s’impose systématiquement, avec production d’un bilan, d’un compte de résultat et d’une annexe détaillée. La nomination d’un commissaire aux comptes est obligatoire pour les fondations reconnues d’utilité publique, quel que soit le montant de leurs ressources. Cette exigence garantit la fiabilité des informations financières communiquées aux autorités de tutelle et aux donateurs.
Le reporting s’étend au-delà des simples comptes financiers. Les fondations doivent produire un rapport d’activité annuel détaillant l’utilisation des ressources et l’avancement des missions statutaires. Ce document, souvent volumineux, fait l’objet d’une publication et d’une transmission aux autorités de contrôle. Pour les associations, cette obligation ne s’applique généralement que si elles bénéficient de financements publics significatifs ou si elles sont reconnues d’utilité publique. Comprendre les enjeux de rémunération brute et nette devient crucial lorsque ces structures emploient du personnel salarié.
Reconnaissance d’utilité publique : un statut commun aux deux structures
La reconnaissance d’utilité publique constitue un statut d’excellence accessible tant aux associations qu’aux fondations. Cette qualification, accordée par décret en Conseil d’État, atteste que la structure poursuit effectivement une mission d’intérêt général d’une ampleur et d’une qualité exceptionnelles. L’obtention de cette reconnaissance ouvre des droits élargis, notamment la capacité de recevoir des libéralités (dons et legs) sans limitation.
Pour une association, accéder à la reconnaissance d’utilité publique représente souvent l’aboutissement d’une longue maturation. Il faut généralement justifier d’au moins trois ans d’existence, compter au minimum 200 adhérents, disposer de ressources annuelles d’au moins 46 000 euros, et démontrer un rayonnement dépassant le cadre purement local. Le fonctionnement doit respecter des principes démocratiques stricts, et la situation financière doit être saine avec plusieurs exercices excédentaires consécutifs.
Les fondations reconnues d’utilité publique constituent la forme la plus aboutie de fondation. Leur création nécessite d’emblée cette reconnaissance, contrairement aux associations qui peuvent y accéder progressivement. Le montant de la dotation initiale, bien que non fixé réglementairement, doit être suffisamment conséquent pour garantir la pérennité de l’action. En pratique, les autorités attendent généralement une dotation minimale de plusieurs centaines de milliers d’euros, voire davantage selon l’ambition du projet.
| Critère RUP | Association | Fondation |
|---|---|---|
| Ancienneté minimale | 3 ans d’activité | N/A (création directe) |
| Ressources minimales | 46 000 € annuels | Dotation initiale substantielle |
| Nombre d’adhérents/membres | Minimum 200 | Non applicable |
| Rayonnement géographique | Au-delà du local | National ou international généralement |
| Gouvernance | Démocratique obligatoire | Conseil d’administration qualifié |
| Santé financière | 3 exercices excédentaires | Viabilité de la dotation démontrée |
La reconnaissance d’utilité publique transforme profondément le fonctionnement de la structure. Elle impose des contraintes statutaires standardisées, notamment concernant la composition du conseil d’administration et les modalités de dissolution. En contrepartie, elle confère une légitimité institutionnelle considérable facilitant les partenariats avec les pouvoirs publics et les grandes entreprises mécènes. La Fondation de France exemplifie cette dynamique en servant d’intermédiaire pour de nombreuses fondations abritées.
Le contrôle administratif s’intensifie avec la reconnaissance d’utilité publique. Le préfet du département du siège social exerce une tutelle rapprochée, validant notamment les modifications statutaires majeures et surveillant la bonne gestion. Pour les fondations, ce contrôle s’exerce dès l’origine, alors que pour les associations, il s’ajoute aux libertés antérieures. Cette surveillance peut être perçue comme contraignante, mais elle rassure également les donateurs et partenaires sur la rigueur de la gestion.
Les avantages fiscaux liés à la RUP méritent une attention particulière. Les dons effectués par des particuliers à des organismes reconnus d’utilité publique ouvrent droit à une réduction d’impôt de 66% du montant versé, dans la limite de 20% du revenu imposable. Pour les entreprises, la réduction atteint 60% dans la limite de 5‰ du chiffre d’affaires. Ces dispositifs, particulièrement attractifs, expliquent pourquoi les grandes structures caritatives cherchent systématiquement à obtenir ou conserver cette qualification.
Le processus d’obtention de la reconnaissance d’utilité publique
Obtenir la reconnaissance d’utilité publique exige de constituer un dossier exhaustif démontrant la réalité et l’ampleur de l’action menée. Pour une association, la procédure s’engage auprès de la préfecture du département, qui instruit le dossier avant transmission au ministère de l’Intérieur. Une enquête administrative vérifie la réalité des adhérents, l’effectivité des actions, la transparence des comptes et l’absence de conflit d’intérêts dans la gouvernance.
Le Conseil d’État examine ensuite le dossier et rend un avis sur l’opportunité d’accorder la reconnaissance. Cette instance vérifie la conformité juridique des statuts, la cohérence du projet avec les critères d’intérêt général, et la viabilité économique de la structure. En cas d’avis favorable, un décret en Conseil d’État formalise la reconnaissance, publié au Journal Officiel. L’ensemble de la procédure s’étend généralement sur deux à trois ans, nécessitant patience et rigueur dans le suivi.
Pour une fondation, la reconnaissance d’utilité publique constitue l’acte de naissance lui-même. Les fondateurs doivent donc préparer un dossier complet incluant les statuts, la justification de la dotation, le programme d’action pluriannuel, et la composition du futur conseil d’administration. L’instruction suit un parcours similaire avec enquête administrative et examen par le Conseil d’État. La complexité de cette procédure explique pourquoi certains fondateurs privilégient des formes alternatives comme la fondation abritée ou le fonds de dotation, créés par simple déclaration. Les professionnels du droit peuvent parfois bénéficier d’une dispense de certaines démarches selon leur situation.
Exemples concrets : organisations emblématiques et leurs choix statutaires
L’examen de structures existantes illustre concrètement comment le choix entre association et fondation répond à des logiques opérationnelles spécifiques. France générosités, par exemple, opère sous forme associative pour fédérer les organisations faisant appel à la générosité publique. Ce statut lui permet de rassembler des membres divers partageant des préoccupations communes autour de l’éthique de la collecte de dons et de la transparence financière, dans une logique de réseau horizontal.
La Fondation de France, créée en 1969, incarne le modèle de la fondation reconnue d’utilité publique. Elle gère un patrimoine considérable constitué de dotations initiales et enrichi par des legs successifs. Sa mission consiste à soutenir des projets d’intérêt général dans des domaines variés : action sociale, santé, recherche, culture, environnement. Elle abrite également des centaines de fondations sous son égide, leur offrant un cadre juridique et administratif sans qu’elles aient à obtenir individuellement la reconnaissance d’utilité publique.
APF France handicap fonctionne comme une association reconnue d’utilité publique depuis 1945. Cette structure milite pour les droits des personnes en situation de handicap tout en gérant un réseau d’établissements et services médico-sociaux. Le statut associatif permet aux personnes concernées de participer directement à la gouvernance, incarnant ainsi le principe « rien sur nous sans nous ». Cette dimension participative serait difficilement compatible avec le modèle fondationnel classique.
- Le Secours Catholique combine association RUP et action sociale de proximité avec 67 000 bénévoles répartis sur l’ensemble du territoire
- Emmaüs France privilégie le modèle associatif pour préserver l’autonomie de ses communautés locales fédérées
- Les Restos du Cœur fonctionnent en association pour mobiliser massivement les bénévoles autour de la distribution alimentaire
- UNICEF France est une association loi 1901 représentant en France le Fonds des Nations Unies pour l’Enfance
- WWF France adopte également le statut associatif pour fédérer ses adhérents autour de la protection de l’environnement
Médecins Sans Frontières illustre une configuration hybride intéressante. L’organisation française opère sous forme associative, permettant à ses membres actifs (professionnels de santé partis en mission) de participer aux décisions stratégiques. Cette gouvernance démocratique garantit que l’organisation reste fidèle à ses principes opérationnels et à son indépendance, notamment vis-à-vis des gouvernements et des organisations internationales dont elle refuse parfois les financements pour préserver sa liberté d’action.
Ces exemples démontrent qu’au-delà des considérations juridiques pures, le choix statutaire reflète une philosophie d’action. Les structures privilégiant la mobilisation collective, la participation des bénéficiaires ou l’ancrage territorial tendent vers le modèle associatif. Celles misant sur la pérennité patrimoniale, la gestion de dotations importantes ou des actions nécessitant une gouvernance resserrée optent pour la fondation. Certaines organisations développent même des structures mixtes combinant une association opérationnelle et une fondation gestionnaire du patrimoine.
| Organisation | Statut juridique | Raison du choix |
|---|---|---|
| France générosités | Association | Fédération de membres, gouvernance collégiale |
| Fondation de France | Fondation RUP | Gestion patrimoniale, fondation abritante |
| APF France handicap | Association RUP | Participation des bénéficiaires, militantisme |
| Secours Catholique | Association RUP | Mobilisation bénévole, proximité territoriale |
| Médecins Sans Frontières | Association | Gouvernance démocratique, indépendance |
| Croix-Rouge française | Association RUP | Réseau territorial, missions de service public |
Le secteur humanitaire international privilégie massivement le statut associatif pour des raisons opérationnelles. La capacité à mobiliser rapidement des volontaires, à adapter les programmes aux évolutions des crises, et à maintenir une légitimité auprès des populations bénéficiaires nécessite une structure souple et participative. La lourdeur administrative d’une fondation serait contre-productive dans des contextes d’urgence nécessitant des décisions rapides et une forte réactivité sur le terrain.
Inversement, les structures patrimoniales comme certaines fondations universitaires ou hospitalières justifient pleinement le modèle fondationnel. Lorsqu’un donateur souhaite affecter durablement un capital important à une cause spécifique, par exemple financer des bourses d’études ou soutenir la recherche médicale, la fondation garantit que les ressources seront effectivement et exclusivement consacrées à cet objectif, même plusieurs générations après la création. Cette irrévocabilité rassure les grands donateurs sur la pérennité de leur engagement philanthropique.
Les structures hybrides et alternatives émergentes
Face aux contraintes respectives de l’association et de la fondation, de nouvelles formes juridiques ont émergé ces dernières années. Le fonds de dotation, créé en 2008, permet de constituer une personne morale de droit privé recevant et gérant des biens pour accomplir une mission d’intérêt général, sans nécessiter de reconnaissance d’utilité publique. Sa création se fait par simple déclaration en préfecture, offrant une souplesse proche de l’association avec une capacité patrimoniale inspirée de la fondation.
Cette formule séduit particulièrement les projets de taille intermédiaire ne justifiant pas la lourdeur d’une fondation RUP mais nécessitant une structure dédiée à la gestion d’un patrimoine. Les établissements d’enseignement supérieur ont massivement adopté ce dispositif pour créer leurs structures de collecte de dons. Le fonds de dotation ne peut toutefois pas recevoir de legs, limitant ainsi ses capacités de développement patrimonial par rapport à une fondation reconnue d’utilité publique. Pour les projets nécessitant une flexibilité dans l’organisation du travail, cette structure offre des possibilités intéressantes.
Certaines organisations développent également des montages combinant plusieurs structures juridiques complémentaires. Une association peut créer une fondation abritée sous l’égide de la Fondation de France pour gérer un patrimoine dédié à une mission spécifique, tout en conservant sa structure associative pour les activités opérationnelles courantes. Cette configuration permet de bénéficier des avantages respectifs de chaque statut : souplesse opérationnelle de l’association et sécurité patrimoniale de la fondation.